Performance financière : être vert est-il payant en temps de crise ?

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Performance financière : être vert est-il payant en temps de crise ?

Par Thi Hong Van Hoang, professeur associé en finance et titulaire de la Chaire " Finance Sociale & Durable ", Montpellier Business Scho...

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Par Thi Hong Van Hoang, professeur associé en finance et titulaire de la Chaire " Finance Sociale & Durable ", Montpellier Business School - UGEI

La prise en compte des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) permet de réduire le risque de volatilité des investissements. Shutterstock

L'épidémie de la Covid-19 participe à recentrer la prise en compte des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans les entreprises. Ces risques peuvent impacter les activités d'une entreprise à court et à long terme.

Le sigle ESG a été utilisé pour la première fois en 2004 dans un rapport rédigé par un groupe d'investisseurs institutionnels à la demande des Nations unies afin de développer un guide (Who Cares Wins) sur l'intégration des indicateurs ESG dans la gestion d'actifs.

Depuis cette date, l'investissement ESG ne cesse de se développer et plusieurs initiatives ont rendu leur prise en compte possible, voire obligatoire, pour les entreprises et les fonds d'investissement.

Nous pouvons citer quelques exemples, au niveau mondial, comme les Principes pour l'investissement responsable des Nations unies en 2006, le label Green Bond développé par la Banque mondiale en 2008, les Objectifs du développement durable (ODD) définis par les Nations unies en 2015, et l'Accord de Paris en 2015.

En France, et en Europe, plusieurs initiatives ont également été développées, par exemple l'article 173 de la loi sur la transition énergétique en 2015 pour l'intégration des critères ESG par les investisseurs institutionnels, ou la Directive 2014/95/EU qui rend obligatoire la publication des informations ESG des entreprises européennes de plus de 500 employés.

En France, on retrouve également le label ISR en 2015, ou plus récemment, le projet en cours de la taxonomie européenne qui définit des référentiels pour déclarer la part du chiffre d'affaires, des investissements (capex), et des dépenses d'exploitation (opex) alignée avec les objectifs environnementaux définis. Ces initiatives montrent la nécessité pour les entreprises de prendre en compte les enjeux environnementaux dans leurs stratégies.

Dans ce contexte réglementaire accru, la question que les entreprises peuvent alors se poser est : la performance environnementale est-elle un moteur pour la performance financière ?

Dès les années 1970, les chercheurs tentent de comprendre la relation entre la performance environnementale et la performance financière des entreprises.

Deux courants existent : le premier, revenue side considère que cette relation est positive car une bonne performance environnementale permet d'attirer plus de clients et d'investisseurs. Elle permet aussi d'avoir un cycle de production plus efficient en réduisant la quantité de déchets et en augmentant leur recyclage.

Selon le courant revenue side, la relation entre la performance environnementale et la performance financière des entreprises permet de réduire la quantité de déchets en augmentant leur recyclage..Pixnio, CC BY

De même, une meilleure performance environnementale permet une meilleure prise en compte de crises environnementales dans le développement de l'entreprise, telles que des catastrophes naturelles ou des crises sanitaires. De plus, compte tenu du contexte réglementaire indiqué ci-dessus, une meilleure performance environnementale permet d'éviter des coûts liés au non-respect des normes imposées tout en renforçant la réputation des entreprises.

À propos de la réputation, une meilleure performance environnementale démontre aussi la capacité d'une entreprise à innover. Cette relation positive entre la performance environnementale et la performance financière a été démontrée par plusieurs articles académiques, dont des travaux que nous avons menés.

En revanche, d'autres études ont aussi démontré une relation négative entre la performance environnementale et la performance financière. Cette relation négative peut être expliquée par le deuxième courant qui est le cost side.

Selon cette théorie, pour atteindre une meilleure performance environnementale, il est nécessaire d'effectuer des investissements lourds. Ces investissements peuvent être, par exemple, la réalisation d'un bilan carbone ou l'installation des systèmes d'énergies renouvelables. Cela augmente le coût qui n'est pas systématiquement compensé par un meilleur chiffre d'affaires à court terme. Par conséquent, et selon ce deuxième courant, la performance environnementale réduit la performance financière.

Si les études académiques citées précédemment sont partagées entre le revenue side et le cost side, il est nécessaire d'analyser les impacts à long terme en tenant compte des scénarios de crises, économiques ou environnementales.

Concernant la crise financière de 2008, nos recherches montrent que cette crise a eu pour effet d'augmenter la transparence dans la communication des critères environnementaux dans les rapports annuels des entreprises. En effet, dans un contexte de crise financière comme celle en 2008, la confiance dans le système financier a été remise en cause et les investisseurs cherchent à placer leur capital dans des entreprises avec une communication extrafinancière plus transparente.

À cela s'ajoute une tendance du grand public à croire qu'il est nécessaire de développer un modèle économique plus responsable et plus durable tenant compte des risques environnementaux à long terme. Cette croyance a pour effet d'orienter les flux de capitaux vers des entreprises avec une meilleure performance environnementale, ce qui permet à ces entreprises de mieux résister aux impacts négatifs de la crise.

Pendant l'épidémie de la Covid-19, plusieurs études montrent que les entreprises avec une meilleure performance ESG, dont la performance environnementale, sont plus résilientes.

Ainsi, lorsque l'indice boursier MSCI Monde baisse de 14,5 % en mars 2020, 62 % des fonds d'investissement ESG à grande capitalisation le surperforment.

Les études académiques publiées récemment confirment ces résultats, en démontrant, par exemple, que la performance ESG permet de réduire le risque de volatilité pendant l'épidémie de la Covid-19.

De plus, les investisseurs trouveraient, en outre, refuge dans les investissements ESG car ils ont une orientation à long terme et privilégient la durabilité de leurs stratégies.

Pour conclure, cette résilience pendant l'épidémie de la Covid-19 des entreprises engagées dans les démarches de performance et de transparence des indicateurs environnementaux, sociaux, et de gouvernance (ESG) montre que, malgré le coût des investissements et parfois un effet négatif à court terme, la performance environnementale est bénéfique à long terme et surtout dans les périodes de crise.

Par conséquent, il est nécessaire d'étudier la relation entre la performance environnementale et la performance financière en tenant compte de l'effet du temps et des scénarios de crises environnementales.

Article publié en partenariat avec The Conversation.

The Conversation
 
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